Compte –rendu de la réunion du groupe maternelle 11 février 2011

Publié le par groupematernelle

 

 

Visionnage d’une vidéo tournée le deuxième jour de la rentrée en petite section de maternelle.

Ecoute d’un extrait de l’interview d’Alain Bouregba (psychanalyste, travaillant à la relation parents/enfants auprès de parents en difficulté), réagissant à cette vidéo sur la rentrée en maternelle.

 

  • Résumé de ses propos :

Les enfants arrivent à l’école en portant les représentations de leurs parents. L’école a été vécue par un certain nombre d’entre eux comme un lieu de vexations, de mauvaises notes, d’humiliations.

Par ailleurs, la façon dont va être vécue la première rentrée est liée à la culpabilité que vont éprouver certains parents à laisser leur enfant dans un lieu qu’ils perçoivent comme dangereux pour lui, à cause de la rivalité avec les autres enfants. En effet, l’école est souvent appréhendée comme un lieu de compétition, les alter egos étant perçus comme des adversaires et non comme des alliés.

Trois ans, c’est l’âge où l’enfant prend possession de lui, c’est l’apparition du « je ». C’est également un âge ou l’enfant va petit à petit passer de la représentation imaginaire à la représentation symbolique. La représentation imaginaire établit des similitudes entre l’objet et l’image de cet objet (exemple du vaudou avec la poupée qui représente la personne) ; c’est une représentation qui colle à la réalité.

La représentation symbolique est l’image d’une propriété ou d’une fonction (on lie différents objets qui ont la même propriété) ; c’est une représentation qui permet de s’extraire de la réalité.

A trois ans, l’autre est considéré comme une reproduction de soi, comme un autre soi. Les accueils collectifs fonctionnent comme une caisse de résonance, l’émotion de l’autre devenant la sienne.

 

  • Réflexions des enseignantes du groupe :

 

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      • Les représentations des parents

La question des représentations des parents sur l’école est nouvelle. L’école n’a pas l’habitude de faire avec. Parfois, les enseignants sont alertés par le RASED sur des familles qui sont en défiance par rapport à l’école. Certaines familles sont fuyantes, d’ailleurs.

Le groupe des enseignantes perçoit la violence de la séparation, sur les images. Cette violence est également perçue par les parents, qui voient tous ces enfants pleurer.

Que rapportent les enfants à la maison ?

Certains parents, voyant leur enfant jouer à la maîtresse à la maison, s’imaginent que la maîtresse est une tortionnaire (retours agressifs de parents suite à des jeux de leur enfant).

Il apparaît important d’expliquer aux parents que le jeu n’est pas la réalité, que jouer c’est mettre à distance, apprivoiser et contrôler ses angoisses en les mettant en scène. Il est donc normal que l’enfant joue à des choses qui font peur, c’est important pour qu’il grandisse en se sentant en sécurité, mais ce n’est pas la réalité (le jeu, c’est du « faire-semblant »).

 

A la réunion de rentrée, des enseignantes ont projeté un petit film sur les ateliers de jeu libre avec cartons ainsi que la vidéo sur les ateliers de réflexion, cela a rassuré les parents.

 

 

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      • Rentrée des parents/rentrée des enfants ?

Il semblerait intéressant de mettre un cadre clair : quel est le temps d’accueil des enfants, quel est le temps d’accueil des parents ? Cela éviterait les débordements de parents. Avoir un moment pour accueillir les parents, ça peut les rassurer. Par exemple, leur consacrer un petit temps à midi pour leur dire en quelques mots comment s’est passé la matinée, cela permet de les tranquilliser.

L’accueil des parents en début de temps de classe permet aux petits frères et petites sœurs de rentrer dans la classe, de « s’échapper » pour jouer… cela peut être une première prise de contact positive avec l’école, pour ces enfants.

 

Les enseignantes se questionnent sur l’attitude de certains parents, dont on dirait qu’ils voudraient que la rentrée se passe mal pour leur enfant ou qu’il pleure…

Effectivement, la séparation est difficile pour certains parents. Ils peuvent avoir peur de perdre l’amour de leur enfant, peur qu’il investisse d’autres personnes, d’autres lieux que la maison. Ce sont souvent des parents pour lesquels il est compliqué de relier leur enfant à d’autres qu’eux, leur enfant représentant tout pour eux, et l’école peut être perçue comme venant s’interposer dans leur relation fusionnelle… La maîtresse peut donc être considérée comme une rivale.

Cet éclairage fait écho chez des enseignantes qui comprennent ce qui se joue dans la relation avec quelques mères.

Une réflexion s’engage sur la façon de rassurer ces mères et de ne pas provoquer des attitudes agressives malgré soi.

 

Cela amène également à un questionnement sur le rôle de l’ATSEM.

Deux tendances se dégagent : dans certaines classes, l’ATSEM s’occupe plutôt de l’organisation matérielle des activités, et conduit les enfants aux toilettes.

Dans d’autres, l’ATSEM est celle qui chouchoute, qui se situe sur le versant affectif, ce qui peut peut-être adoucir les phénomènes de rivalité mère/maîtresse mais peut aussi les déplacer sur une rivalité ATSEM/mère. Ces phénomènes peuvent prendre différentes formes dont l’intrusion dans la classe, dans la pédagogie… Ces parents sont perçus comme « énervants ».

Il apparaît donc essentiel de rassurer les parents en reconnaissant et respectant leur fonction et leurs compétences de parents, tout en faisant apparaître la spécificité et la complémentarité du rôle de l’enseignant.

 

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      • L’alter ego perçu comme menaçant

Le double niveau est intéressant, parce que les plus grands sont détendus et cela apaise les petits. Par ailleurs, la maîtresse est plus disponible pour accueillir les nouveaux arrivants.

 

Témoignages de rentrée échelonnée avec des classes PS niveau unique : le jeudi la moitié de la classe est rentrée et le vendredi c’était l’autre moitié. Le lundi tous les enfants sont venus, et le mardi, il n’y avait plus de problème.

Sur le temps de récréation, les petits sont tous seuls (dans une école de 15 classes). Par contre, dans les petites écoles, les petits et les grands frères et sœurs se retrouvent avec plaisir dans la cour. Il existe un risque que certains soient totalement pris en charge par leur grand frère ou sœur. Etre dans des cours séparées leur permet de vivre leurs expériences tous seuls.

 

Les enseignantes constatent que le climat de compétition s’installe rapidement et perdure. Il est fait référence à l’enquête Pisa qui montre bien que l’on est efficace pour les meilleurs élèves au détriment de la majorité. Pour les enseignantes du groupe, privilégier l’instruction au détriment de l’éducation revient à privilégier la compétition au détriment de la coopération.

Il est fait référence à la pédagogie institutionnelle et au travail de l’ICEM.

 

Les enseignantes se questionnent sur la réalité à laquelle renvoie le mot « groupe » : parle t’on d’un « groupement » d’individus mis les uns à côté des autres, ou se centre t’on sur les interactions à l’intérieur d’un groupe ?

Une prise de conscience se fait autour de cette réalité de groupe. La compétition est valorisée socialement et c’est parfois aussi l’attente des parents. L’école se centre peu sur les interactions.

Une classe regroupant les trois niveaux PS/MS/GS favorise la coopération entre enfants.

Les tensions se répercutent aussi entre les enseignants qui stressent par rapport au programme, et éprouvent de l’insatisfaction à ne pas pouvoir faire leur travail comme ils le voudraient…

 

Est évoqué également le problème posé par des parents qui réduisent l’école aux actions « découper », « dessiner »… alors que ce qui est essentiel à l’école maternelle, ce sont les interactions… Comment mettre l’accent sur les interactions ? Cela permettrait par ailleurs d’éviter les phénomènes de rivalité. Nous avons une grande part de responsabilité, car nous ne mettons en lumière que les tâches effectuées par l’enfant et pas tout le travail essentiel sur les interactions…. D’ailleurs, y consacrons-nous le temps et l’énergie nécessaire ? Il semblerait que la tendance aujourd’hui se soit resserrée sur les tâches individuelles. Or ce qui pose un gros problème aux enseignants, c’est bien la difficulté de certains enfants à trouver leur place dans le groupe et à investir l’école, autrement dit les interactions au sens large du terme.

 

 

  • Comment aider les enfants à se construire pour qu’ils puissent devenir élève ?

 

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      • L’attitude de l’enseignant

Quatre petits textes développent de manière très claire et accessible les concepts d’apaisement, d’adossement, d’adressement, d’endossement, essentiels pour que la classe soit un lieu sécurisant, favorisant les divers apprentissages. Ils sont accessibles en ligne et donnent des exemples concrets pour les enseignants.

 

En résumé

La fonction d’apaisement est une fonction pare-excitation : l’adulte va pouvoir accueillir et aider à contenir les angoisses, les tensions, les excitations des enfants parce qu’il va trouver des réponses ajustées, et ne pas renvoyer ses propres affects.

http://dcalin.fr/wordpress/?p=61

 

La fonction d’adossement permet à l’enfant de développer une bonne maîtrise de soi. Elle consiste en la capacité de l’adulte à repérer les mouvements internes des enfants (émotions, fatigue, pulsions…), à les nommer et à s’y ajuster. C’est ce qui va permettre à l’enfant de se structurer à la fois émotionnellement et cognitivement.

http://dcalin.fr/wordpress/?p=62

 

La fonction d’endossement est liée à la construction du sentiment de responsabilité et de l’identité. Dans une situation dont les effets sont négatifs, l’adulte va endosser une part de la responsabilité, afin que l’enfant puisse assumer la sienne (attribuer tout le poids de la responsabilité d’un acte négatif à un enfant ne lui permet pas de l’assumer). A contrario, dans une situation positive, l’adulte va minimiser sa propre responsabilité dans la réussite de l’enfant.

Ainsi, la fonction d’endossement favorise la construction d’une bonne estime de soi et évite d’enfermer l’enfant dans une identité négative (confusion entre les répercussions négatives et la personne).

http://dcalin.fr/publications/endossement.html

 

La fonction d’adressement va permettre aux enfants de construire leur identité individuelle et collective. L’adulte, en s’adressant directement à l’enfant, lui signifie que sa présence est importante. En offrant une place à la parole du groupe, en acceptant les différences et les ressemblances de ses membres, l’adulte institue un « nous » qui ne dévore pas le « je ».

La fonction d’adressement aide donc l’enfant à trouver sa place dans le groupe, en tant qu’individu appartenant à un groupe.

http://dcalin.fr/publications/adressement.html

 

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      • Du regard photo au regard cinéma

Le groupe d’enseignantes se questionne sur les élèves qui se sont construits dans une identité négative, et qui sont stigmatisés par toute la classe. Le regard qui fige n’autorise pas d’évolution et enferme l’élève dans ses actes. Comment passer du regard photo au regard cinéma, c’est-à-dire d’une vision figée à une vision dynamique ?

Il est très important de remettre de la temporalité, de faire exister un passé servant de point d’appui et de garder en ligne de mire un avenir plein de promesses… sinon les enfants sont englués dans des successions d’instants qui ne sont pas reliés entre eux.

Cela semble compliqué à travailler…La notion du temps est quelque chose de difficile à construire. Les collègues énumèrent quelques exemples du travail mis en place par rapport à la structuration du temps comme la coccinelle à déplacer sur la frise de la journée.

Il semblerait que l’école maternelle travaille principalement sur le temps cyclique, et peu sur le temps linéaire. Or c’est bien le temps linéaire qui pose problème à ces enfants qui perçoivent le temps comme une succession d’instants…

A nouveau, la classe à plusieurs niveaux semble intéressante : les élèves se projettent dans le travail à venir. C’est très stimulant pour eux.

 

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      • Altérité, sens et temporalité

En classe de PS, certains enfants n’investissent pas les fiches mais sont intéressés par ce que font les autres. Effectivement, on apprend aussi à travers les autres, dans ce qu’ils font et dans le retour qu’ils nous font. Le regard sur l’autre et le regard de l’autre sont des éléments essentiels à la construction de l’individu.

Cela ramène à un questionnement autour du sens, sens de ce qui est demandé à l’enfant pour lui et pour l’enseignant. C’est l’articulation du projet de l’enseignant et du projet de l’élève.

La question du sens est également liée à la temporalité. Mettre du sens, c’est pouvoir relier des éléments ensemble et laisser résonner en soi. C’est un travail de va-et-vient entre des éléments anciens, connus, intériorisés et des éléments nouveaux, étrangers, qui vont venir interpeller ce qui fait déjà sens pour soi. Pour faire ce travail de lien, il faut être dégagé de l’instant et avoir une perception temporelle plus globale, plus distanciée. C’est ce qui va permettre aux enfants de cerner les articulations, de s’approprier de nouvelles données en réaménageant les anciennes, et d’enrichir leurs savoirs.

 

  • Témoignages divers :

 

  • Parole sur la difficulté à travailler dans la salle des fêtes parce que l’école est en travaux : les enfants sont démotivés et pleurent.

 

  • Travail autour de l’accueil le matin : mise en place d’une fiche personnelle où chaque enfant choisit le type d’atelier dans lequel il veut aller ; il va le dire à la maîtresse qui tamponne. Cela permet à l’enseignante de pouvoir, au moins à un moment de la journée, entrer en relation individuelle avec chaque enfant.

 

 

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